« Pauvre fille, vous vous rendez compte, c'est vraiment horrible. » murmura une voisine en tablier blanc sortit sur le palier pour voir la scène.

C'est à partir de ce moment que je les ai tous haïs. Tous. Les voisins, les personnes dans la rue, mes amis, ma famille. Ces crétins, comment osaient-t-ils ? Ces personnes à qui je ne parlais pas et qui s'étaient mises a me plaindre, à être tout le temps avec moi, me suivant comme des chiens. Ils voulaient me réconforter, mais ils étaient devenus incompréhensibles, grotesques, pitoyables. Comme je les ai méprisés, insultés, ils étaient pires que tous. Il m'était impossible de faire un pas sans qu'une personne plus ou moins lourde n'arrive et me saute dessus croyant que j'allais tomber en pleurs. Ils ne comprenaient pas. C'est alors que je l'ai fait, l'héritage sur les bras je suis partie. J'ai parcouru l'Angleterre et je me suis installée loin d'où je vivais, des gens que je fréquentaient, la Pennsylvanie était un endroit sur, un endroit frais, un endroit où personne ne viendrait m'aider. J'aurais pu reprendre une vie normale, me faire des amis, mais trop de réminiscences, dès que j'apercevais des gens être heureux. Une envie de meurtres, je devenais peu à peu un monstre sans cœur. Mon sourire ne se montrait seulement qu'en de rares occasions, et je devais méprisante et médisante. Cela me faisait du bien, cracher son venin était bénéfique pour moi même. Mais pas du tout pour les relations que j'entretenais. Mais peu m'importais, j'étais seule et libre.

« Tais-toi. » dis-je calmement à mon « camarade » de classe, qui s'évertuait a me faire parler. Si je ne voulais rien dire, c'est sans doute parce que, voyons, je ne voulais rien dire, et surtout pas a un adolescent de dix-huit ans encore pustuleux et se croyant imbattable dans tous les domaines. C'est grâce a lui que j'ai eu une réputation de personne froide et sans égal pour rembarrer les gens. Grâce a lui encore que les gens ne venaient plus m'importuner pour des bêtises, j'étais bien. J'aurais pu le remercier, mais j'avais peur qu'il trouve encore un moyen de me faire devenir humaine. Ou en tout cas persuader des gens que c'était le cas, donc je ne dis rien. Savourant cette solitude bien méritée. J'étais en Pennsylvanie et tout me paraissait facile, j'arrivais tout ce que j'entreprenais. J'avais enfin un but, j'écrivais un livre, et je pensais avoir un dénouement digne des plus grands auteurs de ce siècle. J'étais une vraie éponge, je buvais, sans vraiment m'enivrer, je ne ressentait plus rien, ou bien j'essayais. Mais tout bascula, quand je le vis.

Sway marchait tranquillement, d'un pas assuré, dans ses pensée. Tout son corps était dans son livre, une histoire fantastique. « Heroic fantasy » pour être plus précis, elle aimait ce genre de roman. Avec de la magie, des créatures affreuses. Elle avait eu envie d'impliquer la religion dedans, mais elle avait très peur qu'on la censure. Même si l'époque était plus permissive qu'au XIIe siècle, elle avait renoncé a faire apparaitre des anges et Dieu. La jeune fille se contentait simplement d'une quête, d'un héros, d'obstacles et d'amour. Bien que le fait de mettre de l'amour la perturbe, elle le fait, elle sait que c'est très rentable, l'amour. Le nombre de personnes seules a la recherche d'amour étant très grand, les histoires d'amour remportent un succès fou. Elle allait mettre aussi des batailles féroces pour que les hommes ne soient pas en reste. Elle envisagea même la suite. Perdue au beau milieu du combat de son héros contre le "grand méchant" La jeune fille ne vit pas un beau jeune homme roux face à elle. Et continuant d'avancer ne put pas l'éviter, elle tomba a terre. Refusant la main qu'il lui tendait, elle se releva, s'épousseta, puis regarda avec des yeux noirs l'inconnu qui l'avait fait choir. Mais quand elle vit les traits du jeune homme, l'air meurtrier que portaient ses yeux disparu. Elle resta un moment planté devant lui, il sourit. Il pensait sans doute qu'elle attendait des excuses, il les lui donna, et partit avec un sourire contrit.

C'était la première rencontre avec ce jeune homme, les sentiments que j'ai ressenti ensuite sont incomparables. Mais le temps de m'en apercevoir, l'inconnu était très loin. J'avais besoin de le revoir, c'était impératif. Ce n'était pas comme avec les autres, celui-là me donnait des frissons. Et de savoir que je ne l'avais touché ne serait-ce qu'un instant me troublait. Pendant près d'une semaine, j'écumais tous les bars, les endroits connus comme inconnus, a sa recherche, mais je ne le vis nul part. Il semblait s'être évaporé, il n'avait tout de même pas des ailes ? Mais ce fut lui qui me trouva, alors que je me reposait d'un petit footing dans le parc de la ville.

Mlle Sway Judith était encore haletante quand elle s'assit sur le banc du parc où elle courrait tous les matins, elle venait de s'étirer. Et regardait les autres joggueurs souffrirent. Cela l'amusait bien, elle essayait de penser à autre chose qu'au magnifique roux qu'elle avait bousculé il y avait près d'une semaine. Mais malgré tous ses efforts pour le retrouver sa quête restait vaine. Elle avait donc repris sa vie, toujours aussi hautaine, mais plus lunatique. Son cœur manqua un battement, un éclair roux venait de lui passer devant les yeux, et c'était assis a côté d'elle. Celui qu'elle avait chercher pendant près d'une semaine, s'asseyait près d'elle comme si de rien n'était. Il avait un sourire malicieux sur son visage, il sortit alors de la poche, son médaillon en argent, celui qui lui tenait le plus a cœur. Celui qui lui rappelait tout. Comment avait-elle pu ne pas s'apercevoir qu'il n'était plus a son cou ? Elle tendit la main et il le laissa tombé au creux de sa paume. Sans un merci, Sway le remit autour de son cou. Elle tourna doucement vers l'homme « Qui êtes-vous ? » demanda-t-elle a la fois fascinée et terrifiée. Il la regarda un moment, « Disons... un ami. » lui répondit-il dans un sourire. « Je n'ai pas besoin d'amis. » lui claqua-t-elle au visage, d'un ton qui n'admet pas de réponse. « Qui a dit que j'étais le votre ? ». Sway resta sans souffle un moment. Un battement de cils plus tard, il s'en allait à reculons d'abord, souriant toujours. Puis il se retourna et ne fit plus un regard en arrière, il ne vit donc pas Sway s'enfouir le visage dans ses mains, morte de honte. Et affublée d'un nouveau sentiment très étrange.

J'avais été idiote, mais je n'avais pas pu me controler, j'attendais et j'attends toujours que le vent tourne en ma faveur, et que je le revois. Il le faut.